Le recruteur qui vous approche est-il sérieux?
Trois candidats sur quatre ont connu au moins un épisode de "ghosting" de la part d'un recruteur, c'est-à-dire qu'ils ont tout simplement disparu sans donner de nouvelles ou de retour. Comment en est-on arrivé là ?
Loin d’être un phénomène isolé, l’expérience candidat négative se manifeste sous divers aspects : opacité dans le discours du recruteur, manque d’information sur le processus, absence de retours... Tous ces comportements accentuent le désenchantement des candidats. Vous en doutez? Selon cet article LinkedIn, 60% des chercheurs d’emplois ont vécu une mauvaise expérience de recrutement. Plutôt inquiétant, non?
Même si certains chercheurs d’emploi ferment la porte dès qu’ils prennent connaissance de l’offre, tout se joue au moment du premier contact réel, à savoir l’entrevue. En effet, le candidat est aussi en position d’évaluation. Tout en répondant aux questions de l’intervieweur, il décrypte l’attitude de la personne devant lui. Est-il en retard ou désorganisé? Ses propos correspondent-ils aux informations reçues préalablement? Est-ce qu'il arrive à obtenir des réponses à ses questions? Semble-t-il y avoir un taux de roulement élevé au sein de l'organisation? Bref, son instinct le dirigera vers sa décision finale avant même que la rencontre ne soit terminée.
Bienvenue dans l’ère du McRecrutement
Au risque de vous surprendre encore, le milieu de la restauration et celui du recrutement ont beaucoup en commun. Effectivement, le candidat et l’employeur sont à la fois clients et commandes. Le conseiller en acquisition de talents, quant à lui, incarne le serveur qui met en relation les deux partis. Qui est donc le restaurant? L’agence de recrutement, tout simplement. Comme il existe une gamme de restaurants, allant du fast food à l’établissement 5 étoiles, toutes les agences de recrutement ne se valent pas!
En effet, notre envie constante du « tout, tout de suite et maintenant » va jusqu’à affecter le processus d’acquisition de talents, au point où l’on parle maintenant d’agences fast food. Autrement dit, le recrutement a largement été facilité par des plateformes telles que LinkedIn et Indeed. Il va de soi que l’immense bassin de candidats potentiels qui y sont présents pèse dans la balance, particulièrement en temps de pénurie de main-d’œuvre. Or, bons nombres ont trop capitalisé sur l’accessibilité et la rapidité de ces outils, parfois au point d’en négliger l’aspect humain.
Si les fast food offrent une variété de choix, rien ne sort vraiment du lot. Hamburger, poulet pané, boissons gazeuses: plus on change d’enseigne, plus c’est pareil. Il en est de même avec certaines agences qui se fient trop aux plateformes d’application en ligne. Prenons l’exemple de la fonction « candidature simplifiée » de LinkedIn. Certes, cela accélère et facilite le processus, autant pour le recruteur que le candidat. Cependant, cela impose aussi un format d’application standardisé sans lettre de présentation, donnant lieu à des candidatures totalement dépersonnalisées et presque toutes plus identiques les unes que les autres. Impossible donc de voir la personnalité du demandeur d’emploi à travers la mise en page de son CV ou les points forts sur lesquels il appuie dans sa lettre.
Un festin pas si joyeux
Qui plus est, bien que quantité rime avec qualité, cela ne signifie pas pour autant qu’ils sont synonymes. Effectivement, une stratégie de recrutement de type fast food augmente considérablement la visibilité du poste à pourvoir, mais à vouloir faire trop vite, certains détails importants pourraient échapper à l’œil du conseiller en acquisition de talents. De fait, il est plus susceptible de recevoir des profils qui ne correspondent pas à ce que l’employeur recherche. Mieux vaut donc proposer un menu plus restreint. En effet, un bon recruteur devrait porter une attention méticuleuse aux besoins de son client et des candidats, afin de connaitre assez chaque parti pour les présenter l’un à l’autre. À vrai dire, c’est le même principe qu’un sommelier, qui observe votre commande pour vous proposer le parfait accord met-vin!
Dans la même optique, ne vous demandez pas pourquoi les grands restaurants ne disposent pas de service au volant. Un recruteur qui se veut sérieux devrait agir tel un serveur qui vient vous demander si tout est à votre goût et non vous laisser partir une fois la commande transmise. En d’autres mots, il ne s’éclipse pas une fois le processus d’embauche terminé. Au contraire, pendant l’intégration et même après, il continue de jouer un rôle de conseiller, autant pour l’employeur que l’employé, en s’assurant régulièrement que l’expérience se déroule bien d’un côté comme de l’autre. Cette idée s’applique également aux autres candidats qui n’ont pas obtenu le poste : en apprenant à réellement connaitre un profil, le conseiller en acquisition de talents peut l’orienter vers une opportunité plus intéressante. Une véritable relation gagnant-gagnant!
Un phénomène qui n’affecte pas que les candidats
Recruteurs, candidats, entreprises clientes… Tous peuvent souffrir d’un processus d’acquisition de talents. En effet, en 2020, au plus fort de la pandémie, 92 % des chercheurs d’emploi ayant vécu une expérience de recrutement négative n'hésitaient pas à partager leur expérience. À une époque où les médias sociaux sont l'un des principaux vecteurs d'interaction sociale, en 2021, 72 % d’entre eux n'ont pas hésité à en parler en ligne, ternissant ainsi la marque employeur et la réputation de l'organisation. Au même titre que pour d’autres phénomènes sociaux, des comptes Instagram tels que Balance ta startup, ont d’ailleurs vu le jour afin de dénoncer ces expériences.
Résultats : certains candidats en garderont un goût amer, cultivant une mauvaise perception du recruteur, mais aussi et surtout, de l’entreprise. Ils ne postuleront pas auprès de cette agence ou de cette organisation et iront parfois jusqu’à boycotter les produits et services de cette dernière. De leur côté, en étant désorganisés et en ne prenant pas le temps de bien connaître le profil des candidats ou les besoins de l’entreprise, les recruteurs risquent de perdre la confiance de l’un comme de l’autre. Au contraire, si le processus se déroule bien, l’entreprise lui offrira d’autres contrats et le candidat sera plus susceptible de le recommander.
Pour résumer, chers recruteurs : dites NON à la quantité et OUI à la qualité. Chères entreprises, faites vivre votre marque employeur à l’extérieur de votre organisation. Chers candidats : écoutez votre instinct mais faites aussi du recruteur qui vous approche un allier, en n’hésitant pas à lui demander des conseils. Certains conseillers en acquisition de talents travaillent uniquement pour leur client. D’autres travaillent plutôt pour le candidat. Et s’il était temps de conjuguer les deux?
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